Restaurateurs : quand l’inspiration devient-elle de la copie ?

22/10/2025

Un nom de restaurant trop proche peut coûter cher

Vous êtes restaurateur, artisan ou entrepreneur ? Vous rêvez d’ouvrir un établissement inspiré des tendances du moment ? Attention : la justice rappelle que la frontière entre inspiration et contrefaçon est parfois très mince. Dans une décision récente (Tribunal judiciaire de Paris, 8 octobre 2025, n° 23/06665), le tribunal a tranché un litige entre deux groupes de restauration italienne, Big Mamma (titulaire de la marque « Libertino ») et la société [B], exploitante d’un restaurant sous l’enseigne « Liberto ». L’affaire est riche d’enseignements, notamment sur la contrefaçon de marque, mais surtout sur les limites de la concurrence déloyale et du parasitisme.

1. Contrefaçon de marque : quand un nom ressemble trop à un autre

Les faits

Big Mamma, groupe connu pour ses restaurants italiens, est titulaire des marques « Libertino » (déposées en France et dans l’UE en 2019) pour des services de restauration. En 2021, la société [B] ouvre un restaurant italien sous l’enseigne « Liberto », un nom très proche phonétiquement et visuellement.

La décision du tribunal

Le tribunal a retenu la contrefaçon de marque, estimant que l’usage du signe « Liberto » par [B] créait un risque de confusion pour le public. Pourquoi ?

  • Similarité visuelle et phonétique : « Libertino » et « Liberto » partagent 6 lettres identiques en début et fin de mot.
  • Identité des services : les deux enseignes proposent de la restauration italienne.
  • Usage commercial : le signe « Liberto » était utilisé sur l’enseigne, le site web, les réseaux sociaux et les menus.

Conséquence : [B] a été condamnée à cesser l’usage du signe « Liberto » sous 30 jours, sous astreinte, et à verser 10 000 € de dommages-intérêts à chacune des sociétés plaignantes.

💡 À retenir : Même une légère modification d’une marque existante peut être sanctionnée si elle crée un risque de confusion. Vérifiez toujours la disponibilité des marques avant de choisir un nom ou une enseigne et élaborez une stratégie de marque avec un avocat.

2. Concurrence déloyale et parasitisme : l’inspiration ne suffit pas à condamner

Les allégations de Big Mamma

Big Mamma accusait [B] d’avoir copié :

  • L’identité visuelle de ses restaurants (murs de bouteilles, décoration florale).
  • Le modèle économique (jeunes équipes dynamiques, produits frais italiens).
  • La stratégie de communication, créant un risque de confusion dans l’esprit des clients.

Le rejet des demandes par le tribunal

Le tribunal a débouté Big Mamma de ses demandes en concurrence déloyale et parasitisme, pour deux raisons majeures :

  1. Absence de preuve d’une identité visuelle protégée : Big Mamma n’a pas démontré que ses codes esthétiques (murs de bouteilles, décoration florale) étaient uniques, originaux et associés spécifiquement à sa marque. Or, ces éléments sont répandus dans la restauration parisienne et new-yorkaise.
  2. Pas de valeur économique individualisée : Pour caractériser le parasitisme, il faut prouver qu’un concurrent s’est placé dans le sillage d’un autre pour profiter de ses investissements sans effort. Ici, le tribunal a estimé que la reprise d’un concept (restaurant italien jeune et dynamique) ou d’éléments décoratifs communs ne suffisait pas.

💡 En clair : La simple reprise d’un style ou d’un concept ne constitue pas, à elle seule, un acte de concurrence déloyale ou de parasitisme. Il faut prouver l’originalité, la notoriété et l’appropriation indue d’éléments distinctifs.

3. Que retenir pour votre activité ?

Pour éviter les risques

  • Protégez vos créations : Déposez vos marques, logos et éléments distinctifs (décoration, packaging) pour bénéficier d’une protection juridique solide.
  • Documentez vos investissements : Si vous estimez qu’un concurrent copie votre concept, conservez les preuves de vos efforts (photos, factures, articles de presse, études de marché) pour démontrer la valeur économique de vos choix.

Si vous êtes accusé de contrefaçon ou de concurrence déloyale

  • Vérifiez l’originalité des éléments reprochés : Sont-ils vraiment uniques et associés à une seule entreprise ?
  • Consultez un avocat spécialisé pour évaluer les risques et préparer votre défense.

Conclusion : inspirez-vous, mais créez votre propre identité !

Cette décision rappelle que la liberté du commerce prime, sauf si l’imitation porte atteinte à des droits protégés ou à des éléments uniquement associés à une entreprise. Pour les entrepreneurs, la leçon est claire : inspirez-vous, mais créez votre propre identité – et protégez-la !

Besoin d’un accompagnement personnalisé pour sécuriser votre projet ou défendre vos droits ? Contactez Mochon Avocat pour une analyse sur mesure de votre situation.

Contacter le Cabinet

Thank you! Your submission has been received!
Oops! Something went wrong while submitting the form.